De la tente à l'architecture

Des habitations en forme de tente

Il est assez frappant, en regardant l’architecture des maisons aujourd’hui, de retrouver la forme conique du toit déjà présente pour les tentes préhistoriques. Les maisons en dur, à leurs débuts, étaient le prolongement des tentes préhistoriques dans le cadre de la naissance de l’agriculture et de la sédentarisation. Des matériaux plus solides et plus résistants étaient alors utilisés. Le critère de la légèreté n’étant plus de mise, on pouvait utiliser aussi bien du bois que de la pierre. Les matériaux dépendaient des localisations, d’où les toits de tuiles rouges dans le sud-est de la France et les toits gris en ardoise dans le nord du pays, par exemple.

Depuis les années 2000, nous pouvons observer l’émergence d’habitations en dur moderne au toit plat, qui s’éloignent plus de la forme conique de la tente. Néanmoins, la tente connaît un certain renouveau mondial dans l’inspiration des habitations contemporaines.

Chris Tate par exemple, architecte de renommée, a imaginé les plans de sa propre maison de vacances sur l’île Waiheke, en Nouvelle-Zélande. Il avoue s’être inspiré d’une expérience personnelle au cours de laquelle sa tente de camping s’est effondrée sur lui pendant la nuit, en 2007. Il souhaitait reprendre le concept d’un espace réduit qui suffisait pour vivre. Et sa forme. En 2016, il a alors créé une structure simple de 70m2 mais néanmoins confortable où il semble faire bon vivre, perdue au milieu de la végétation.

Au Japon, un cabinet d’architectes nommé Takeru Shoji Architects a conçu une étonnante maison en forme de tente en 2019. La Hara House (en photo au-dessus) n’est pourtant pas destinée à une seule famille. Elle a pour vocation de servir de lieu collectif commun à toute la communauté et aux passants.

Cet aspect n’est pas sans rappeler les camps de tentes. Des espaces de socialisation où il n’est pas nécessaire de quitter sa tente pour parler à son voisin. Le but étant de retrouver la forte connexion que le village avait autrefois. Cette habitation offre une surface totale de 166 m2 avec un étage. Elle comprend une cuisine, une salle de bain, une chambre et des espaces de vie. En somme, tout ce qu’il faut pour vivre.

En parallèle de ces constructions d’habitations sous forme de tente, nous constatons une tendance émergente depuis quelques années : le glamping (ingénieuse combinaison des mots « glamour » et « camping ») destinée aux amateurs de nature en recherche d’un plus grand confort. Des innovations ont ainsi lieu pour transformer la tente traditionnelle “canadienne” en un habitat unique. C’est le cas par exemple de la tente “SuperPausée“.

Aujourd’hui la tente est de nouveau au centre des réflexions sur l’architecture moderne et permet d’offrir une variété d’habitats. Mais la tente n’inspire pas que les habitations…

Les architectures à structure tendue

Les architectures à structure tendue se caractérisent par l’utilisation de membranes textiles tendues (en PVC ou tissus de verre PTFE) supportées par des éléments de structures en bois, en béton, ou le plus souvent en métal. Ces constructions sont de plus en plus visibles dans notre environnement quotidien car elles sont esthétiques, faciles à monter et permettent de fournir de grande surface d’ombre.

Grâce à leur caractère amovible, léger et non-définitif ou semi-permanent, elles étaient beaucoup utilisées jusque dans les années 1970 pour l’organisation d’évènements sportifs, car elles étaient faciles et rapides à mettre en place et à plier.

Grandement inspirées des tentes, leur forme n’est pas sans rappeler les habitations des populations nomades. Les structures tendues étaient déjà utilisées dans l’Antiquité par les Romains : ils recouvraient leurs arènes avec de grandes toiles de coton pour se protéger du soleil. Puis Frei Otto, architecte allemand, a remis au goût du jour ce type de structure lors de l’exposition universelle de Montréal en 1967.

Aujourd’hui, elles séduisent de plus en plus et tendent à faire partie intégrante de l’environnement urbain (centres commerciaux, parkings, arrêts de bus, maisons de particulier,…) : leur capacité à moduler la lumière, leur rapidité de construction, leur légèreté, et leur faible coût de construction et d’entretien les rendent particulièrement attractives. Ce sont des structures durables, esthétiques et écologiques. On peut noter que l’acier des structures tend à être remplacé par l’aluminium du fait de son poids trois fois plus faible.

Si la tente inspire par sa forme, la dimension culturelle et identitaire qui l’entoure constitue un argument supplémentaire pour s’en inspirer.

la tente khaïma, une inspiration culturelle

La tente khaïma est une importante source d’inspiration pour l’architecture urbaine des villes du nord de l’Afrique et de l’Orient. Cette omniprésence de la tente peut témoigner de la difficulté de passer d’un mode de vie nomade à la sédentarisation.

On retrouve ainsi des m’bar qui signifie « abri » ou « construction » en berbère, dans plusieurs pays d’Afrique du Nord, notamment au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Si elle peut désigner des structures nomades, cette appellation désigne également une construction métallique, généralement de forme rectangulaire, et disposant d’un toit à deux pentes. Cela n’est pas sans rappeler les caractéristiques de la tente. Néanmoins, le m’bar est constitué de matériau plus résistant. C’est une structure plus permanente, contrairement à la tente qui est faite pour être transportable.